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Libération
Edito

Tentative de putsch au Brésil : la démocratie n’est jamais acquise

Élection présidentielle brésilienne 2022dossier
L’attaque des lieux de pouvoir brésiliens dimanche, par des soutiens de l’ex-président Jair Bolsonaro, avertit Lula et les chefs d’Etat démocrates qu’ils ne doivent jamais baisser la garde face à l’extrême droite.
Devant le palais présidentiel du Planalto, dimanche à Brasília. (UESLEI MARCELINO/REUTERS)
publié le 9 janvier 2023 à 21h30

Ce que beaucoup craignaient est donc arrivé, mais au moment où l’on s’y attendait le moins. Une semaine après l’investiture de Lula à la tête du Brésil, des hordes de partisans de Jair Bolsonaro en furie ont fondu dimanche soir sur les principaux lieux du pouvoir à Brasília, dévastant tout sur leur passage pour marquer leur refus d’accepter le résultat de la présidentielle et tenter un putsch. Sidérée et horrifiée, la planète entière – y compris Moscou et Pékin – a unanimement condamné lundi les insurgés qui ressemblaient davantage à des fauves qu’à des révolutionnaires, et encore, nous sommes cruels pour les fauves : ceux-ci n’ont pas pour habitude de se prêter à des selfies en plein saccage. Ces scènes sont apparues d’autant plus choquantes qu’elles rappelaient en tout point celles de l’attaque du Capitole, le 6 janvier 2021 à Washington, par des trumpistes ivres de rage tentant de bloquer l’investiture de Joe Biden. Ce qui en dit long, et c’est là le plus grave, sur la fragilisation croissante de la démocratie, que l’on avait tendance à considérer comme un acquis dans les pays ayant la chance de l’expérimenter.

La bonne nouvelle c’est que, dans les deux cas, les fous furieux ont été stoppés et l’opinion, dans sa grande majorité, n’a pas basculé. Mais combien de tentatives faudra-t-il avant que la digue ne cède vraiment ? A Brasília, on a vu la police réagir mollement à l’assaut et, pire encore, l’armée se tenir en retrait, non pas en soutien mais pas loin d’être complice comme l’analyse un expert cité par notre correspondante au Brésil. Ce qui est préoccupant dans un pays qui a une longue expérience de la dictature militaire (Bolsonaro s’en est suffisamment félicité). L’avantage c’est que Lula, qui semblait vouloir ménager l’armée, du moins ne pas s’y opposer frontalement, a désormais toutes les raisons pour y mettre de l’ordre et éloigner les officiers les plus bolsonaristes. Il sait désormais qu’il ne doit jamais baisser la garde. Et avec lui, tous les chefs d’Etat démocrates et progressistes.