La prise de conscience écologique n’est plus réservée à cette partie de la population que le dérèglement climatique inquiète. Grâce aux scientifiques et aux écologistes, militants ou simples citoyens qui, depuis des années, lancent des cris d’alarme, elle est désormais dans tous les esprits. Y compris au plus haut niveau de l’Etat. A lire l’interview que nous a accordée Elisabeth Borne, on aimerait y croire : après une crise sanitaire, une crise géopolitique et un été puis un automne aux températures extrêmes, soudain, l’urgence écologique s’impose comme une priorité du gouvernement. Mais entre les lignes de cette interview on mesure bien le chemin qu’il reste à parcourir. Car les efforts pour assurer cette transition écologique ne semblent pas également répartis. Où est la contribution des plus riches au sursaut collectif ? L’instauration d’un ISF climatique ? La limitation des jets, yachts, 4×4 et autres véhicules ultra-polluants ? Pour l’heure, on ne les voit pas. Comme si cette catégorie de la population devait être exemptée de toute pression particulière. «La transition écologique, c’est vivre mieux demain», affirme Elisabeth Borne. Oui, bien sûr, mais elle va d’abord coûter cher car c’est un modèle de société tout entier qu’il faut changer. Chacun va devoir y mettre du sien. Et l’urgence ne doit en aucun cas occulter l’objectif final. Or, la crise actuelle montre bien les limites de la bonne volonté gouvernementale. Traumatisé par la crise des gilets jaunes – qui avait précisément été déclenchée par la hausse d’une taxe sur les produits énergétiques – conscient des sacrifices imposés aux ménages par l’inflation, l’exécutif semble tenté de remiser à plus tard ses bonnes résolutions, prêt à tout pour que la colère sociale s’apaise. Ce sont plutôt des solutions concrètes, notamment en matière de transport collectif, qu’il faut proposer. Elles sont urgentes et coûteuses. C’est bien de ne pas vouloir «agresser les gens sur leur façon de vivre» mais illusoire d’attendre tranquillement que les esprits mûrissent.
Edito
Urgence climatique : il va falloir aller plus loin
Elisabeth Borne à Matignon, ce jeudi. (Denis Allard/Libération)
publié le 20 octobre 2022 à 20h55
Dans la même rubrique