Lundi 8 septembre après-midi, à sa demande, François Bayrou va gravir les marches qui conduisent à la tribune de l’Assemblée nationale pour demander la confiance des députés. Pas comme d’autres, jadis en place publique, grimpaient vers l’échafaud, n’exagérons rien, mais avec la certitude tout de même qu’il s’adressera pour la dernière fois aux députés en tant que Premier ministre. Le suspense est en effet nul. En organisant ce week-end une séance photos dans toutes les positions du Premier ministre touché, un cliché dans le jardin, un autre dans son bureau, un troisième à la fenêtre, François Bayrou a acté que son bail à Matignon ne sera bientôt qu’un souvenir.
C’est peu dire que son passage à la tête du gouvernement restera une bizarrerie qui se résume par cette question : pourquoi donc le Béarnais a-t-il, il y a neuf mois, mis tant d’énergie à tordre le bras d’Emmanuel Macron qui rechignait à le nommer à Matignon, pour, une fois installé, ne jamais vraiment prendre la main ? La vraie histoire de son magistère recèle encore bien des mystères. Pour les résoudre, les historiens devront revisiter ces eaux troubles de la macronie agonisante, arpenter le terrain vague d’un budget introuvable, sonder le fossé de cette surestimation de soi dans lequel est tombé le maire de Pau.
Ce qui n’a rien de mystérieux, en revanche, c’est que la France va s’enfoncer un peu plus ce lundi dans un épais brouillard. Et que cela n’a rien de réjouissant. Les plus fragiles sont les premières victimes d’un pays à l’arrêt. Ils le seront davantage si la crise politique mute en crise de régime. Ce jour, tous les regards seront tournés vers François Bayrou. Normal, et à la fois injuste. Le premier responsable de la situation s’appelle Emmanuel Macron. Sa dissolution fut une faute. Son départ, en plus de rajouter de la crise à la crise, créerait un dangereux précédent. Le Président n’a pas toutes les clés en main pour dessiner les mois qui nous séparent de la prochaine présidentielle. Mais il en détient une : répondre au sentiment profond d’injustice qui plombe le pays.