Menu
Libération
L'édito de Dov Alfon

Emmanuel Macron et le fantasme de la chasse aux fainéants

Avec les réformes prévues pour l’«acte II» de son projet social, le chef de l’Etat lance un nouvel assaut contre les plus précaires, ignorant les vrais problèmes du marché de l’emploi.

Emmanuel Macron à Bruxelles le 1er février. (Ludovic Marin/AFP)
ParDov Alfon
Directeur de la publication et de la rédaction
Publié le 13/02/2024 à 21h04

La fainéantise supposée des Français a toujours été la grande obsession d’Emmanuel Macron, et probablement la seule constante de son discours politique. De «Je ne veux plus entendre “j’ai encore droit de rester un peu au chômage !”» en 2017 à l’annonce de l’acte II pour libérer «ceux qui font, qui osent, qui travaillent» en janvier 2024, en passant par «Je traverse la rue et je vous en trouve» et autre «On met un pognon de dingue dans les minima sociaux», le Président a toujours imaginé l’économie française comme le journal de Spirou plombé par Gaston Lagaffe, des millions de Lagaffe dont l’oisiveté est le seul obstacle aux contrats mirobolants que propose Monsieur de Mesmaeker.

C’est avec le même degré de maturité politique et avec le même mépris pour notre système social que son gouvernement annonce maintenant des mesures miracles pour redresser la courbe du chômage : la réforme du RSA, la réduction de l’assurance chômage et la suppression de l’allocation de solidarité spécifique (ASS), toutes s’attaquant à une population précaire et sans défense. Après les jeunes trop flemmards, les femmes trop au foyer, les pauvres trop dépensiers et les chômeurs trop ivrognes, il s’agit maintenant de redresser – pour leur propre bien – les cadres seniors qui font la fine bouche à France Travail. L’unique ambition de ce plan somme toute assez misérable étant de faire quelques économies, il ne résoudra en rien les problèmes structurels du marché de l’emploi.

Au lieu de fantasmer sur une mystérieuse épidémie de flemme qu’il faudrait combattre en coupant les vivres aux branleurs, le gouvernement pourrait augmenter les taux d’activité des plus de 60 ans (ou de tous les Français d’ailleurs) en modifiant l’attractivité des emplois proposés. Pour cela, il faudrait plancher sur la reconnaissance de l’utilité d’un métier, la rémunération, les conditions de travail et les perspectives offertes au long d’une carrière. Mais ça, ce serait trop de travail, sans doute.