Samuel Pintel a déplié une carte IGN, tracé au compas un cercle de 25 kilomètres de rayon autour de Chambéry (Savoie), suivi les cours d’eau, repéré le relief, fouillé dans sa mémoire pour refaire le chemin parcouru quinze années plus tôt avec son copain Marcel. Les deux enfants de 6 ans avaient été installés dans une carriole, tirée par un homme à vélo, qui les avait menés jusqu’à une maison d’enfants dans un petit village. Ils venaient alors d’échapper, le 16 novembre 1943, à la rafle de l’hôtel des Marquisats, un centre d’assignation à résidence établi à Annecy (Haute-Savoie). Comme les autres, Samuel était sur la liste, mais sa mère, Tauba, avait réussi, juste avant de se faire embarquer, à le faire passer pour le fils de la seule résidente non juive.
Entretien
Retracer son itinéraire
Cette jeune femme, qu’il n’a jamais identifiée, l’avait ensuite mené à Chambéry, au siège de l’Union générale des Israélites de France (Ugif). Là où le cycliste était venu le chercher. Là ,où il retourne à la fin de cet été 1958, se heurtant à des murs. Samuel Pintel, alors âgé de 21 ans, tente de combler les trous de son enfance, de retracer étape par étape son itinéraire d’enfant juif né à Paris de parents polonais à travers la France occupée. La quête de sa vie. Il nous la raconte chez lui dans le Val-d’Oise, un matin de mars à l’occasion de la publication de ses mémoires l’Enfant d’Izieu (éd. Harper Collins).
Ce n’est que près de trente ans plus tard, assis dans son salon devant la télévision, qu’il parviendra à ap