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TRIBUNE

France-Haïti : une reconnaissance partielle et partiale

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A l’occasion du bicentenaire de la rançon imposée par la France à Haïti, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’une commission d’historiens. Il n’est cependant pas question de réparation dans cette démarche qui semble empêtrée d’une vision impérialiste, pointe le docteur en sciences politiques Frédéric Thomas.
L'ancienne esclave affranchie devenue révolutionnaire et officière de l'armée révolutionnaire Sanité Belair (1781-1805) sur un billet de 10 gourdes haïtiennes, en 2004. (Getty Images)
par Frédéric Thomas, docteur en sciences politiques, chargé d’étude au CETRI – Centre tricontinental
publié le 18 avril 2025 à 18h49

Le 17 avril 1825, Charles X, «ordonne» à Haïti de payer une indemnité de 150 millions de francs pour «dédommager les anciens colons». En échange, la France «concède» l’indépendance à son ancienne colonie. Celle-ci s’était pourtant libérée seule, à travers une longue guerre de libération, vingt et un ans plus tôt, en 1804. Mais, dans le contexte colonial et esclavagiste du XIXe siècle, Haïti est à la fois une monstruosité et une menace : aucune nation civilisée n’est prête à reconnaître cet Etat né d’une révolution victorieuse d’esclaves noirs.

Deux cents ans plus tard, le 17 avril 2025, par un communiqué, le président Emmanuel Macron revient sur cette histoire. Côté face, une prise de parole au sommet de l’Etat afin de «regarder cette histoire en face» et de «refuser l’oubli et l’effacement». L’annonce également de la mise en place d’une commission mixte franco-haïtienne d’historiens, coprésidée par Gusti-Klara Gaillard Pourchet, historienne haïtienne dont les travaux ont largement contribué à éclairer cet événement. Côté pile, l’absence de demande de pardon, sans référence aucune aux termes de «réparation» et de «restitution», ainsi qu’une méthode biaisée qui reste empêtrée dans une vision impériale.

Ambiguïtés et confusion

Présenter la révolution haïtienne comme «fidèle à l’esprit» et «en harmonie avec les idéaux de la Révolution française» est quelque peu réducteur ; elle incarne aussi et surtout sa ligne de crête, ses contradictions e