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Interview

Frédéric Gros : «Dire que la guerre est dans la nature humaine est un raisonnement paresseux»

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Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
Dans son dernier ouvrage, le philosophe, professeur à Sciences-Po Paris, tente de répondre à la question «Pourquoi la guerre ?» et souligne l’ambivalence morale des conflits, entre héroïsme et barbarie.
«D’une manière générale, si vous diabolisez l’ennemi, vous vous interdisez de négocier avec lui.» (André Derainne/Liberation)
publié le 17 février 2023 à 16h48

Il y a bien une chose sur laquelle on ne va pas s’écharper : la guerre est scandaleuse, intolérable, elle nuit au progrès et empêche la prospérité. Elle n’a pourtant jamais disparu de l’horizon, prenant depuis la Seconde Guerre mondiale des formes diverses : actes terroristes, factions, génocides, jusqu’à revenir, il y a un an, en Ukraine, dans une configuration plus classique, celle de deux armées en uniforme qui se font face.

Chez les philosophes, il y a des projets de paix, si possible perpétuelle. Dans le monde politique, il y a des organisations internationales pour la garantir. Et chez les militaires, des opérations pour tenter de la maintenir. Mais alors pourquoi la guerre, toujours, tout le temps ? C’est la question vertigineuse que pose le philosophe Frédéric Gros sur la couverture de son dernier livre. Refusant de la voir comme une chose profondément attachée à la nature humaine – réponse aussi immédiate que naïve à la question –, le professeur à Sciences-Po cherche des réponses du côté des désirs humains (individuels ou collectifs) qui entraînent nécessairement des rapports de violence avec l’autre. Et rappelle que, longtemps, elle a été considérée comme un moyen normal, codifié, de régler un conflit.

Il y a un an, quand la Russie a agressé l’Ukraine, on a parlé du