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Entretien

Frédérique Aït-Touati : «La question écologique percute le théâtre au point d’en modifier les formes»

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La biodiversitédossier
La chercheuse au CNRS et metteuse en scène, qui a travaillé avec Bruno Latour, montre dans son dernier essai comment la séparation «nature» et «culture» s’est aussi inventée dans les théâtres italiens au XVIIe siècle.
(Lisa Bluemn/Liberation)
publié le 26 août 2024 à 17h50

Le monde dans lequel on vit, c’est avant tout des histoires qu’on se raconte. Et les pensées écologiques sont formelles : pour lutter contre le réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité, il va non seulement falloir réfléchir à des solutions techniques et à des programmes politiques, mais aussi changer de mots pour décrire et se représenter le monde. La révolution écologique aura donc aussi lieu… au théâtre. Metteuse en scène et historienne des sciences, proche de Bruno Latour avec lequel elle a beaucoup travaillé, Frédérique Aït-Touati en est persuadée.

Dans Théâtres du monde. Fabriques de la nature en Occident (La Découverte, 2024), elle montre comment la séparation moderne entre «nature» et «culture» s’est aussi inventée dans les théâtres italiens, où la mise au point de décors de fond de scène et l’invention de machines pour représenter des tempêtes ont réduit le monde non humain à un simple décor. Pour la spécialiste, tout ne se joue pas dans la tête des philosophes ou les laboratoires des scientifiques, et pour créer un monde nouveau, les arts vont devoir venir à la rescousse…

L’idée qu’il va falloir réinventer nos modes de vie pour lutter contre les crises écologiques est désormais admise. On ne sait pas toujours comment s’y prendre, mais on entend beaucoup parler de «bifurcation». Est-ce un bon mot pour parler des changements urgents à entreprendre ?

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