L’avocat Henri Leclerc, 89 ans, président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme, revient sur un demi-siècle d’amitié et d’engagements à gauche avec son ami et confrère Robert Badinter, disparu dans la nuit de jeudi à vendredi 9 février à 95 ans.
Comment réagissez-vous à cette disparition ?
C’est une déchirure, je suis submergé par l’émotion, les souvenirs… C’était un ami, un compagnon de route, et un phare dans la vie politique française. On déjeunait souvent ensemble, chez lui. On parlait littérature, des écrits de Victor Hugo – sur la peine de mort, bien sûr. Les dernières fois, je me rappelle qu’on a parlé des débats de la Révolution française sur l’abolition, ou des Etats généraux de la justice. Sur le fonds on était toujours d’accord.
Quel héritage laisse-t-il sur le plan du droit ?
Comme tout le monde, c’est la façon admirable dont il a mené la réforme de l’abolition qui me reste. Il n’avait pas supporté l’exécution de Roger Bontems en 1972, qu’il n’avait pas réussi à éviter. Il en avait tiré un livre démontant les dérapages judiciaires, et la mécanique atroce de la cérémonie. Cette affaire a été charnière dans son engage