Le président des Etats-Unis, Joe Biden, a la mémoire un peu courte. Dans la précipitation d’une prise de Kaboul, qui semble toujours lui échapper un peu, et face aux critiques de ses adversaires, à commencer par Donald Trump, il a remis les pendules à l’heure : les Etats-Unis ne sont pas intervenus en Afghanistan pour créer un Etat fort et démocratique, mais seulement pour les préserver d’une menace et d’une organisation terroristes. La mission est donc finie, et les boys peuvent rentrer à la maison avec la fierté de la mission parfaitement accomplie. Cette relecture historique oublie quelque peu les ambitions démesurées du pays au lendemain des attentats du 11 septembre 2001. Défendue par les conservateurs au pouvoir, la volonté de démocratiser le monde arabe faisait partie de la guerre «contre la terreur» (War on Terror) et de la lutte contre les «Etats voyous». Dans cette optique, ce départ, parfaitement assumé et très consensuel, en dit long sur le rétrécissement des objectifs du pays en vingt ans. Il en indique surtout l’étonnant retournement : cette grande guerre démocratique a été suspendue car elle a finalement mis en péril la démocratie états-unienne elle-même.
Un feu imprévu par les autorités militaires
La prise de conscience a été lente. Forts de ses succès initiaux en Irak et en Afghanistan, confortés par la capture d’Ossama ben Laden et le démantèlement d’Al-Qaeda, les Etats-Unis y ont vu le résultat de choix stratégiques et budgétaires anciens donnant une priorité absolue, et jamais discutée