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TRIBUNE

Le «grand soir» des robots : quand nous ne serons plus humains

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Automatisation, robotisation, numérisation de notre environnement social… on assiste à la substitution progressive de relations techniques aux relations naturelles au monde. Tout cela nous accoutume graduellement à vivre dans un monde qui peut se passer de confiance.
Le numérique devient toujours ­davantage l’intermédiaire obligé de nos relations au monde : monde ­­phy­sique (GPS, objets connectés), monde des personnes (visioconférences, ­réseaux ­sociaux)... (Thomas Jackson)
par Mark Hunyadi, Philosophe, professeur de philosophie à l’Université catholique de Louvain, il est associé à l’Institut Mines-Télécom (chaire des Valeurs et politiques des données personnelles). Auteur de «Au début est la confiance» (Le Bord de l’eau, 2020).
publié le 26 décembre 2022 à 20h10

D’autres vies que la nôtre (1/4). Les chercheurs ont pris l’habitude de les appeler «non-humains». Il s’agit de tous ces êtres avec lesquels nous cohabitons (ou pourrions cohabiter à l’avenir) sans en avoir toujours conscience : les microbes qui peuplent nos corps et notre environnement, les plantes de nos parcs et de nos forêts, les extraterrestres que nous rencontrerons sans doute un jour, et les robots qui prolifèrent autour de nous. Libé explore ces formes d’existence, qui posent mille questions aux sociétés humaines.

Fait anthropologique remarquable : nous sommes toujours davantage en position de devoir obéir à des machines. Cela avait commencé par les voix préenregistrées au téléphone, les ceintures de sécurité nous ordonnant de la boucler, les distributeurs de billets nous intimant de composer un PIN. En 2014, un robot avait été nommé au conseil d’administration d’une société hongkongaise, à l’époque où la domotique meublait déjà notre environnement d’objets connectés. Le monde de la finance est robotisé de longue date. Médecins, assureurs, juristes ne peuvent plus se passer de l’intelligence algorithmique ; agriculteurs et vignerons y viennent aussi.

Les robots sont promis à un avenir radieux. Leur «grand soir» sera la «singularité», ce moment de bascule où les machines prendront définitivement le pouvoir sur les humains ;