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Entretien

Estelle Delaine : «L’extrême droite profite de la jeunesse des institutions européennes»

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Elections européennes 2024 dossier
Dans un essai documenté, la sociologue décrit la stratégie de normalisation du Rassemblement national au Parlement européen, en dépit de son discours europhobe, et alors qu’un nouveau scrutin se tiendra en juin 2024.
Au Parlement européen de Strasbourg, le 18 octobre 2023 : au centre, Jordan Bardella, à sa gauche, Gunnar Beck (Allemagne), et à sa droite Roberts Zile (Lettonie). (Pascal Bastien)
par Wassila Belhacine
publié le 20 novembre 2023 à 16h40

L’extrême droite mord-elle la main nourricière ? A défaut de la dévorer goulûment, elle en profite allègrement. En effet, le Rassemblement national (RN) est sous le coup de la justice pour avoir fait rémunérer des assistants parlementaires présumés fictifs par le Parlement européen, comme le révélait récemment Libération. Dans A l’extrême droite de l’hémicycle européen (éditions Raisons d’agir), Estelle Delaine, maîtresse de conférences en sociologie à l’université Rennes-II, expose la manière dont ce courant politique tire profit de sa présence dans l’institution tout en s’affichant anti-européiste. Son enquête est basée sur une ethnographie de trois ans et demi au Parlement européen et dans les meetings du RN. La présence grandissante d’eurodéputés d’extrême droite dans l’hémicycle favorise la normalisation du courant politique, alors que des élections européennes se tiendront en juin 2024.

Les eurodéputés du RN émettent régulièrement des critiques europhobes tout en faisant carrière au Parlement…

Cette ambiguïté est l’élément le plus surprenant lorsqu’on se penche sur la présence du RN au Parlement : comment peuvent-ils être aussi antieuropéens tout en maintenant leur candidature à chaque scrutin ? Ce paradoxe n’a pas empêché l’élection de nombre de ses dépu