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Interview

Marc Augé : «Il m’apparaît de plus en plus que la mort n’existe pas»

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De couvre-feux en confinements, l’isolement risque de nous faire oublier que l’expérience d’autrui est nécessaire à la plénitude de l’expérience de soi. Mais l’anthropologue rappelle que le bonheur peut s’éprouver même pendant des périodes de malheurs et de catastrophes.
Photo issue de la série «120mm», basée sur l'expérience du confinement lors de la crise sanitaire au printemps 2020. (Cyril Zannettacci/Vu pour Libération)
publié le 15 février 2021 à 19h58

Eminent africaniste, l’anthropologue Marc Augé a aussi travaillé en Amérique latine et en Europe. Mais il n’a jamais négligé notre quotidien pour autant. Il a été à l’origine d’une ethnologie de notre environnement immédiat, en créant, avec Emmanuel Terray, Gérard Althabe et Jean Bazin, le Centre d’anthropologie des mondes contemporains de l’EHESS. Il est ainsi l’auteur de l’Eloge de la bicyclette (Payot) ou du Métro revisité (Seuil). Dans son dernier ouvrage, la Condition humaine en partage (Payot Rivages), il est question du monde comme il va, et de notre place d’humain. Il revient sur certains de ses concepts fondateurs, toujours d’une grande actualité, comme celui de «non-lieux», ces espaces interchangeables où l’être humain reste anonyme : centres commerciaux, aires d’autoroutes… Des lieux souvent dédiés à la consommation que l’homme ne parvient pas à s’approprier, à humaniser (1). Il y est également question de «surmodernité», caractérisée par une «surabondance événementielle», une surabondance spatiale qui confine à l’ubiquité et enfin une «individualisation des références» : la volonté de chacun d’interpréter par lui-même les informations dont il dispose, et non de se reposer sur un sens défini collectivement. Pour affronter ce monde en mutation, Marc Augé prône un retour à des valeurs simples, comme la dignité, la confiance ou la fraternité.

Comment vivez-vous cette période étrange ?

Je la vis comme un double con