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Libération
Interview

Mariame Tighanimine : «L’histoire de mon père ouvrier venu du Maroc est une page de l’histoire nationale»

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Dans «Notre Histoire de France», la sociologue retrace la vie de son père, Marocain recruté et exploité dans les mines puis les usines Renault à partir des années 60, et de son frère, lui aussi ouvrier. Un récit intime qui raconte aussi le destin de dizaines de milliers d’immigrés originaires du royaume chérifien, et de leurs enfants.
Chaîne de montage de voitures dans l'usine Renault de Flins-sur-Seine, en 1975, dans les Yvelines, France. (Dominique Berretty/GAMMA RAPHO)
publié le 13 décembre 2022 à 5h04

C’est l’histoire d’une famille dont le père marocain est arrivé en France en 1963 pour travailler dans les mines, et n’est jamais reparti. Une histoire singulière qui raconte celle de milliers d’autres – ils seraient 80 000 Marocains à avoir été recrutés par un certain Félix Mora qui sillonnait les campagnes du royaume afin de trouver de la main-d’œuvre pour les mines des Houillères des bassins du Nord et du Pas-de-Calais.

Dans Notre Histoire de France (Stock), la sociologue Mariame Tighanimine livre un récit familial passionnant qui suit la trajectoire de son père, Lahcen, du fond de la mine jusqu’à la chaîne de l’usine Renault de Flins, puis celle de son frère Jamel, qui marche dans les pas ouvriers du père et qui a tout fait pour se défaire de l’image du jeune de banlieue à laquelle il était sans cesse ramené. Destin entravé par le poids des déterminismes auquel les cinq sœurs réussiront à échapper. «Je suis comme beaucoup de Français·e·s, le produit d’une partie de l’histoire postcoloniale faite d’exploitation, d’exil, de déracinement et d’enracinement», écrit l’autrice.

Question inévitable : comment appréhendez-vous la rencontre France-Maroc en demi-finale de la Coupe du monde de football ?

J’avoue être gênée car ce Mondial me pose problème. Le Qatar est un pays