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TRIBUNE

Mettons les moyens pour soigner les victimes de violences sexuelles infantiles

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Violences sexuellesdossier
Alors que le gouvernement a érigé la santé mentale en «grande cause nationale 2025», il est indispensable que les victimes d’inceste et d’autres violences sexuelles soient traitées dans des conditions saines et égalitaires, plaide Guillaume De La Chapelle, psychiatre et membre de la Ciivise.
«Rendre aux victimes des violences sexuelles une justice sanitaire est une obligation morale et une nécessité dans leur parcours de réhabilitation et de guérison», martèle le psychiatre Guillaume De La Chapelle. (Martin Bertrand/Martin Bertrand)
par Guillaume De La Chapelle, psychiatre et membre expert de la Ciivise
publié le 22 novembre 2024 à 17h40

Estelle ne supporte pas la digestion de certains aliments, tout comme elle ne tolère qu’un savon spécifique pour nettoyer, abondamment, sa peau. Karima, à 14 ans, apprend qu’elle n’est plus vierge alors qu’elle n’a souvenir d’aucune relation sexuelle passée. Elle se persuade qu’elle est folle. De douleur, elle l’est. Paul s’alcoolise avec une régularité de métronome et dans ces moments de forte consommation il est assailli d’un mélange de rage et de tristesse qui le conduit à se mutiler les avant-bras. Après un burn-out, Aurélie a été diagnostiquée bipolaire. Douleur, tachycardie, elle panique dès que son corps, dont elle se sent coupée, s’emballe. Sylviane a traversé plusieurs crises professionnelles et familiales. Ses états dépressifs, intenses, sont difficiles à prendre en charge tant elle craint de se retrouver victime d’un abus de pouvoir, notamment médical.

Si leurs tableaux cliniques sont très différents, tous présentent une vulnérabilité commune : ils ont subi des violences sexuelles durant leur enfance. C’est le fils ou le mari de la nounou, un oncle, un entraîneur, un voisin, un soignant… Quelqu’un dont le visage et l’identité ont pu être oubliés. Ou contre qui une mère, malade psychiatrique elle-même, s’est abîmée à porter plainte et à ne pas avoir été crue. Ou encore dont on appren