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Interview

Michaël Fœssel: «Si la gauche s’est affaiblie, c’est parce qu’elle a délaissé le plaisir»

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Gauche 2022 : le grand embouteillagedossier
Plutôt que de céder à l’ascèse, le philosophe plaide dans son dernier essai pour des expériences politiques qui renouent avec la dimension «subversive» du plaisir et avec l’allégresse.
Michaël Fœssel, à Paris le 27 janvier 2022. (Audoin Desforges/Libération)
publié le 29 janvier 2022 à 5h50

C’est ce qu’on appelle mettre les pieds dans le plat. La gauche a-t-elle un problème avec la jouissance ? Philosophe et professeur à l’Ecole polytechnique, Michaël Fœssel prend le sujet à bras-le-corps dans un nouvel essai, Quartier rouge : le plaisir et la gauche (PUF). Comment lutter contre les injustices économiques, le réchauffement climatique, pointer du doigt les discriminations tout en incarnant un horizon joyeux et émancipateur ? L’équation est complexe. Pour y répondre, le penseur appelle les mouvements de gauche à repolitiser la notion de plaisir. Etape indispensable pour refaire rêver politiquement.

La gauche a-t-elle abandonné le plaisir ?

On prétend aujourd’hui que la gauche est par principe moralisatrice et culpabilisante. Elle condamnerait le plaisir parce qu’il est une manière d’adhérer au réel sans le transformer. Or il me semble que si la gauche s’est affaiblie, c’est en partie parce qu’elle a délaissé le plaisir, un concept qui demeure pourtant hautement subversif. L’affect le plus souvent privilégié à gauche est le désir. Le désir, c’est ce qui nous porte vers un ailleurs, une alternative. Pour des mouvements fondés sur le refus de la société telle qu’elle existe, il semble logique de privilégier le désir des gens et de tenter de l’orienter vers l’égalité. Mais la gauche ne doit pas pour autant abandonner le