Un sentiment de gâchis. Mis sous pression par la grogne des agriculteurs, qui s’est étendue ce mardi 23 janvier, le gouvernement Attal a promis de prendre des mesures d’urgence pour tenter de calmer un mouvement social, meurtri par la mort accidentelle d’une agricultrice fauchée sur un barrage, potentiellement explosif. Et si sentiment de gâchis il y a, c’est que l’on peut malheureusement presque prévoir que les annonces susceptibles d’être faites ne résoudront en rien le vrai malaise de l’agriculture française. Sans doute que cette colère protéiforme d’une profession elle-même aux multiples facettes pourra être contenue par des annonces de court terme sur le prix du carburant, la manière de soutenir les revenus des agriculteurs les plus en difficultés ou la promesse de réduire les normes. Mais le malaise d’une profession, où le taux de suicide est dramatiquement élevé, restera entier.
Voilà des décennies que les paysans français s’interrogent sur le sens de leur métier, répondent à des injonctions contradictoires, cherchent leur place dans une société qui les a longtemps figés dans une image d’Epinal très terroir, sans rapport avec l’évolution de leur métier. Le tout avec la bénédiction d’un duo infernal : le syndicat agricole majoritaire, la FNSEA, et le pouvoir politique. Ce couple-là a consciencieusement œuvré pour que l’agriculture française, face aux enjeux notamment environnementaux qu’elle a devant elle, préfère la politique de l’autruche. La FNSEA réclame ces jours-ci d’être «accompagnée» pour faire face aux défis de cette transition. Mais comment a-t-elle depuis des années accompagné ses troupes ? Par un lobbying intense, que ce soit à Bruxelles, Paris ou dans la moindre réunion départementale avec le préfet, pour que rien ne change vraiment. Il n’est évidemment pas question de nier les difficultés de la profession. Elles sont réelles. Il faut y répondre. Mais en mettant aussi ses représentants devant ses responsabilités.