10 mai 1981. J’ai 16 ans. Né sous de Gaulle, j’ai grandi sous Giscard. Je suis en première A1 (littéraire, latin-grec) au lycée La Fontaine, Paris XVIe. Je passe le bac français, dans ma classe, il y a trois garçons pour 27 filles. J’habite seul avec maman… rue de Quatrefages, Paris Ve, dans l’immeuble où Georges Perec écrivit les Choses l’année de ma naissance, en 1965. Je l’ignore, je ne connais pas encore Perec, les jeunes gens ne lisent pas la littérature contemporaine. Je dévore Sartre, qui est mort l’an dernier. Tous les jours, pour me rendre au lycée, je prends la ligne 10, de Jussieu jusqu’à Porte d’Auteuil (direct), passant d’un quartier d’intellectuel de gauche à un univers de bourgeois de droite. Comme le monde est cohérent, ordonné… Le Monde est le journal que je lis parfois parce que ma mère est abonnée, je regarde plutôt la télé d’Etat, j’écoute la radio d’Etat, et le rock tendance new wave. J’aime le lycée parce que j’aime les autres et la littérature, l’histoire, les langues mortes. J’aime mes professeures, qui sont toutes des femmes, car nous sommes en section littéraire : madame Raimond, professeure de français-latin est de droite exigeante, qui aime Barrès, Giraudoux et Montherlant, des auteurs que je déteste, prisés par Mitterrand ; et madame Castagnou, professeure de grec (la femme du futur maire PS du XIVe arrondissement), qui nous dira sa joie le lundi 11 mai, partagée par sept hellénistes. Je veux devenir écrivain. Je n’ai pas enc
«Ecritures»
10 mai
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Chronique «Ecritures»dossier
par Thomas Clerc
publié le 8 mai 2021 à 8h23
Enquête Libé
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