Cette semaine, j’ai eu 40 ans. Enfin ! Je vais pouvoir penser à autre chose maintenant. J’ai passé bien trop de temps déjà à piétiner devant l’obstacle. Alors bien sûr ce n’est rien, un simple symbole (mais n’en sommes-nous pas entièrement composés ?), un mauvais moment à passer. En tout cas, c’est ce que j’avais cru jusqu’à ce que la vague fonde sur moi avec son lot d’urgences, d’obsessions, d’inachevé, de regrets, de désirs, de révolutions et de chutes ; mais me voilà debout à nouveau. L’idéal est toujours de vivre la crise en amont, avant la hauteur fatidique, histoire d’arriver frais et dispos pour l’épreuve elle-même, comme le sauteur fournit l’essentiel de l’effort avant l’envol, déliant ensuite ses jambes, son torse et ses bras, pour s’enrouler tel Richard Fosbury autour de la barre haut placée, se glissant finalement de l’autre côté comme une anguille, ou peut-être un serpent.
Bifurquer à temps
Il y a bien une brisure qui se produit dans nos têtes à tous – nous nous croyons comme toujours uniques, nous ne sommes que des moutons reproduisant, générations après générations, un réflexe arbitraire et absurde qui ne nous appartient même pas. Mais est-il si absurde que cela ? La césure au milieu d’une vie a peut-être un vrai sens, le temps que nous avons inventé ne sert finalement qu’à cela, mesurer nos pas sur la Terre, voir où nous en sommes de nos attentes et de nos désirs, bifurquer à temps, reprendre le train au vol. Nous avons certainement modelé notre temps d’humains dans ce but : ess