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Libération
Chronique

Comme un parfum de IVe République sur les plateaux télé, par Daniel Schneidermann

Dans une ambiance de fin de régime, le ballet des silhouettes politiques qui se succèdent aux portes du pouvoir n’a rien à envier à celles des années 50. Seule la sémantique change, dans la bouche des journalistes des chaînes en continu.

Sébastien Lecornu revenant sur les raisons de sa démission sur le perron de l'hôtel Matignon, le 6 octobre. (Laurent Caron/Hans Lucas. AFP)
Publié le 10/10/2025 à 18h19

Dans les documentaires historiques sur la guerre d’Algérie, ou sur la guerre froide, ou sur l’Indochine, les documentaristes souhaitant signifier la IVe République en quelques images, insèrent en général des scènes de voitures pénétrant dans les palais officiels, Elysée ou Matignon. En sortent de graves messieurs en pardessus et chapeaux, qui grimpent les marches, s’engouffrent, puis ressortent. Pour accentuer le ridicule de ces pantins, les scènes sont parfois accélérées, manière Charlot. Ainsi, dans les codes visuels des archives politiques, signifie-t-on l’instabilité du «régime des partis», régime d’impuissance, appelé à sombrer en 1958 dans la guerre d’Algérie. Après quoi, le régime suivant ne fut plus incarné que par une haute et unique silhouette en képi, agitant les bras sur les balcons.

De l’extinction de la démocratie à l’apocalypse trumpienne

En 1958, Alain Duhamel a 18 ans. «Moi j’ai connu la IVe République», rappelle-t-il ces jours-ci de plateau en plateau sur BFM, imposant le silence aux jeunots qui l’entourent, justement nés aux alentours de cette année-là dans le meilleur des cas, et que rajeunit soudain le sémillant octogénaire. Réalisent-ils à ce moment qu’ils entrent précisément eux aussi dans l’histoire visuelle, en figurants du chapitre décadence et fin de régime, et peut-être pire (