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Résidence sur la terre

Couvre-feu : respecter ce qui me semble respectable

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Chronique «Résidence sur la terre»dossier
En réalité, une mesure comme le couvre-feu sacrifie le lien humain, vital à la santé psychologique, au profit de l’activité commerciale. Devant tant de bêtises et de railleries, avant de perdre la boule, l’écrivain Pierre Ducrozet passe en mode résistance.
Jim Carrey dans «Fous d'Irène», des frères Farelly (2000). (Photo12)
publié le 5 février 2021 à 21h31

Ça y est, c’est fini. Jusque-là j’ai fait les efforts nécessaires, j’ai suivi la plupart des règles parce qu’elles me semblaient aller dans le sens commun, j’ai adhéré au collectif, à la patience, espérant que le surgissement de l’événement-monde nous rapproche et nous rende solidaires. Mais nous sommes arrivés au bout de cette phase. Les dispositifs mis en place ne me semblent pas suivre la raison démocratique, et difficile d’y déceler des traces de sagesse collective.

J’ai donc décidé, unilatéralement, et dans le respect d’autrui, de m’autoriser une marge de manœuvre. J’ai le droit, comme citoyen, d’avoir un droit de regard sur les lois qu’on m’impose, et devant tant d’absurdité, de grotesque (vous ne pouvez pas avoir de relations sexuelles avec une personne en dehors de votre bulle : nouveau décret qui vient d’entrer en vigueur à Madrid et à Valence), de manque de respect (vous ne devez pas parler dans le métro bondé, qu’on vous autorise par ailleurs à prendre, dans une grande magnanimité, pour aller soutenir l’économie), je m’octroie le droit de respecter ce qui me semble respectable.

Je me sens aujourd’hui comme Jim Carrey dans Fous d’Irène, quand, après une vie passée à être bienveillant avec les autres, il explose devant tant de bêtise et de railleries, se transformant en un Mr Hyde déchaîné.

Nous sommes tous sur le point de perdre la boule comme lui. 20 % des Français sont atteints de dépression, et le chiffre augmente évidemment en fonction de la précarit