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Libération
Chronique «Philosophiques»

De l’air pur, mais aussi de l’air libre

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Le maire EE-LV de Bordeaux défend désormais de fumer à moins de 50 mètres des écoles. Après deux ans de restrictions de la liberté d’aller et de venir, ajouter des interdictions aux interdictions est-il le meilleur moyen de réconcilier les citoyens et la politique?
Michaël FOESSEL.
par Michaël Fœssel, Professeur de philosophie à l’Ecole polytechnique
publié le 26 novembre 2021 à 4h01

«La clope au bec à la sortie des écoles maternelles et primaires, c’est désormais interdit.» C’est par ces mots que le maire écologiste de Bordeaux a annoncé l’adoption d’un nouvel arrêté interdisant de fumer à moins de 50 mètres des écoles. Dans un souci de clémence, l’amende qui menace les contrevenants est modique (onze euros, soit à peu près le prix d’un paquet de cigarettes). Même si elle ne s’adresse pas aux écoliers, mais aux adultes qui se trouvent à proximité des écoles, la mesure se veut «pédagogique». La période de pédagogie passée, si les mauvaises manières persistent, la maire n’exclut pas de procéder à des sanctions plus lourdes.

Je m’en voudrais de crier avec les loups réactionnaires qui, à chaque fois qu’une municipalité écologiste prend une mesure (de la multiplication des pistes cyclables à l’arrêt des subventions publiques aux clubs d’aviation) dénoncent la «tyrannie verte». C’est plutôt au nom d’une minorité que gauche et droite confondues condamnent depuis plusieurs décennies à l’invisibilité que cette chronique est écrite, j’ai nommé les fumeurs. Sans céder à une rhétorique excessivement victimaire, on peut dire que ce genre de décisions (amenée, n’en doutons pas, à se généraliser) ne va pas améliorer leur vie déjà compliquée.

Après avoir payé au prix fort son paquet de «Nuit gravement à la santé» et jeté un regard attristé sur le poumon noirci qui orne ce paquet, le fumeur se demande où, ailleurs que chez lui, il va pouvoir se consacrer à s