Au siècle dernier, c’était l’entartage. Aux cris de «entartons entartons les pompeux cornichons», l’activiste belge Noël Godin, autosurnommé Georges Le Gloupier, s’introduisait dans les conférences, colloques, meetings où pontifiaient ses cibles, manifestement choisies pour leur apparence de sérieux (Marguerite Duras, PPDA, Jean-Pierre Elkabbach, Nicolas Sarkozy, Bill Gates, etc.) et les entartait à la chantilly. En dépit de l’innocuité du projectile, «l’attentat pâtissier» avait le don de mettre les victimes en rage, et on garde le souvenir visuel de Bernard-Henri Lévy, une des cibles les plus fréquentes, poursuivant avec ses gardes du corps l’entarteur pour lui casser la gueule. Ce n’est pourtant pas à l’honneur des victimes qu’il était porté atteinte, mais seulement à leur image, à leur apparente dignité.
Peut-être Manuel Valls aurait-il préféré être entarté, ce matin du 24 décembre où, au lendemain de sa nomination au gouvernement, il est traité «d’étron», en direct au micro de France Inter, par un auditeur assurant se prénommer Jean-Noël. Tout ce qui désigne les excréments est unanimement considéré, au moins depuis le «merde» de Cambronne, comme l’insulte ultime, contre laquelle il n’est pas de réplique à la hauteur. Cet «étron» est un assassinat, certes symbolique, mais qui n’est pas sans résonner, c