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Chronique «Résidence sur la terre»

Mohamed Mbougar Sarr, dernier membre de la confrérie secrète autour de Roberto Bolaño

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Dans cette constellation gravitant autour de l’écrivain chilien mort en 2003, qui court sur tous les continents, on compte un nouveau venu, tout juste récompensé du prix Goncourt.
publié le 30 octobre 2021 à 10h12

Les écrivains tracent des dessins dans l’air, essayant ainsi de donner forme au monde, dans l’idée, insensée, de mieux le comprendre, ou peut-être d’élargir encore son mystère. Lorsqu’ils y parviennent, leurs formes s’impriment dans nos neurones et nous ne pouvons plus voir les choses comme avant, de même qu’il est impossible de regarder un corps ou un paysage comme si Picasso ou Van Gogh ne les avaient pas remodelés à jamais, ou d’écouter une mélodie et les modulations des cœurs humains comme si Mozart n’était pas passé par là.

Des formes débarquent et on n’avait jamais vu le monde ainsi auparavant.

Il existe une confrérie secrète dans la littérature contemporaine. Les livres d’un certain écrivain chilien du tournant du siècle dernier ont modifié leur manière de concevoir le monde proliférant et labyrinthique qu’ils habitent, et la littérature. A chaque fois ou presque que je parle à une écrivaine ou un écrivain, d’ici ou là, de ma génération ou à peu près, je découvre que ce même lien nous relie. Souvent, à sa lecture, je reconnais le tissage, la ligne de traîne qu’a laissée le mystérieux écrivain et les possibilités qu’il a ouvertes. Parfois elle est plus cachée au regard, mais tous ou presque reconnaissent la puissance, la filiation, l’arbre généalogique qui s’en voit dès lors modifié.

Des pages de Despentes aux rues de Barcelone

L’écrivain chilien, vous l’avez deviné, s’appelait Roberto Bolaño et sa