Les élections européennes ne sont pas réputées provoquer des bouleversements telluriques, mais ça n’en reste pas moins une consultation piégeuse. Nous sommes en 1993, Michel Rocard, l’ancien Premier ministre de François Mitterrand pendant trois ans, vient de prendre le contrôle du Parti socialiste, sans réussir pour autant à rassembler autour de lui tous les éléphants du parti. Commentaire du chef de l’Etat auprès de sa garde rapprochée qui digère mal s’être fait souffler le parti : «Rocard est nul et ne comprend rien à la politique. Ne vous en mêlez pas, il perdra tout seul, pas besoin de l’aider.» Conquérant, l’élu de Conflans-Sainte-Honorine décide de prendre la tête de la liste socialiste aux élections européennes de 1994. François Mitterrand, contrairement à ce qu’il avait dit à ses amis, est bien décidé à l’arrêter. Le Président dispose d’une arme qui va faire beaucoup de dégâts : il pousse Bernard Tapie, inscrit au Parti radical de gauche à prendre la tête de liste du Mouvement des radicaux de gauche, afin de couper l’élan rocardien. Et la cible est atteinte. Le 12 juin 1994, la liste Rocard ne fait que 14,49 %, et la liste de Bernard Tapie, avec 12,03 %, le prive d’un rassemblement de la gauche qui aurait dû lui servir de tremplin pour la présidentielle. Michel Rocard a compris : il renonce à se présenter à la présidentielle. Fin de partie.
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