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Enki Bilal, prophète en son plateau, par Daniel Schneidermann

A l’occasion de la sortie de son livre «Shakespeare-Bilal, une rencontre», l’auteur de bande dessinée livre sa parole. Mais le plus sidérant n’est pas tant son discours que l’épaisseur et l’intensité du silence qui l’accueille.

Le dessinateur Enki Bilal lors du festival Bibliothèques Idéales à Strasbourg, le 4 septembre 2022. (Nicolas Roses /ABACA)
Publié le 26/11/2023 à 11h39

Reconnaissons-le : Michel Houellebecq n’étant pas en grande forme, une place de prophète anti-woke est à prendre. Où donc trouver un prophète, même d’occasion mais ayant encore peu servi ? Justement, l’auteur de bande dessinée Enki Bilal vient de publier un «beau livre» sur sa mise en images de Roméo et Juliette, modestement titré Shakespeare-Bilal, une rencontre. A la faveur d’un reportage promotionnel dans la Tribune dimanche, il raconte que «ça fait trente ans que j’annonce à mes copains qu’avec l’islamisme on est foutus», et que «le wokisme produit de la haine du capitalisme, d’Israël, de l’homme blanc». Hosanna ! Un prophète nouveau est né. Le voici, portant son éternel bonnet, religieusement accueilli sur BFM puis sur France 5, dans l’avant-soirée conviviale d’Anne-Elisabeth Lemoine, devant Patrick Cohen et Pierre Lescure également subjugués.

L’homme qui a rencontré Shakespeare «est très en colère, très inquiet, profondément écœuré par le climat actuel», annonce la présentatrice. Le motif de cette inquiétude ? Rien moins que «l’Occident qui s’effondre». Si Bilal fait un prophète crédible, c’est qu’il a des références. «Vous avez la réputation d’un dessinateur visionnaire. En 1998, vous aviez imaginé la chute des tours du World Trade Center.»

Entre prophètes

En fait, ce n’est pas exactement ça. Dans la série le Sommeil du monstre, c’est la tour Eiffel qui s’écroulait, victime d’une conspiration conjuguée des trois monothéisme