Bienvenue dans notre rendez-vous mensuel de l’observatoire des absurdités contemporaines. Installez-vous, servez-vous un café. J’ai une histoire à vous raconter. En effet, j’ai une amie à qui il arrive une chose étonnante. (Oui, je sais combien ce «j’ai une amie qui…» est éculé, à l’instar de ses variantes qui permettent de parler de soi sans en avoir l’air, pour garder la face). Bref. J’ai donc une amie qui se retrouve dans une situation assez délicate. Ridicule, pourrait-on dire – même si la nature de ce ridicule reste à définir : est-il ridicule-grotesque, et a-t-elle raison de vouloir conserver l’anonymat ? Ou bien est-il ridicule-presque-sublime (pensez «Quichotte»), et l’anonymat servira-t-il plutôt à allégoriser l’anecdote, à l’universaliser ? A vous de juger. Moi, tout ce que je peux vous dire, c’est que j’ai une amie qui se retrouve à apprendre à voler à un oiseau. Ou plutôt : elle se retrouve à apprendre à apprendre à voler à un oiseau. Dans cette histoire, la race de l’oiseau n’a pas d’importance ; sentez-vous libre d’imaginer un pigeon, ou une perruche, ou encore une tourte voyageuse, même si le dernier spécimen de cette espèce s’est éteint en 1914 au zoo de Cincinnati.
Ce qui compte, c’est que vous imaginiez une femme pour qui vous avez de la sympathie, voire de l’estime. La voilà qui passe des heures en ligne, en quête de tutoriels. De jour, de nuit. Plus gênant encore, la voici en train de faire des mouvements de bras censés suggérer le vol (pensez «danse des c