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Chronique «Médiatiques»

Gaza, climat : la rhétorique du «au bord de la catastrophe», par Daniel Schneidermann

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Le «bord» serait cette ligne invisible, en deçà de laquelle tout n’est pas encore perdu ? Si on est «au bord», c’est qu’il «n’est pas trop tard», et que les passivités, les prudences verbales, les restrictions mentales ont été jusqu’ici excusables. Jusqu’à quand ?
Depuis le 2 mars, Israël interdit toute entrée de nourriture et de matériel médical. Ici, des Palestiniens font la queue pour une portion de nourriture distribuée par une cuisine caritative au camp de réfugiés de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 5 mai 2025. (Eyad Baba/AFP)
publié aujourd'hui à 9h00

«On est au bord de la catastrophe !» s’afflige le politiste franco-israélien Denis Charbit, invité de Karim Rissouli, dans l’émission C ce soir (France 5). Un invité récurrent raisonnable, balancé, douloureux, l’un de ceux qui, régulièrement − grâces en soient rendues au service public − emplissent l’écran de leurs profonds silences, de grands mots appliqués comme des pansements sur la passivité générale devant le carnage à ciel ouvert de Gaza.

Depuis le 7 Octobre, C ce soir est sans doute l’émission qui a suivi le plus régulièrement ce carnage. C’est à la fois une persévérance louable, et une illusion. Il est magnifique, d’entretenir au cœur du chaos la petite flamme de la discussion entre raisonnables des deux camps, et de nourrir cette petite flamme de subterfuges verbaux, suggérant que l’on n’a pas encore plongé, justement, au cœur du chaos.

Mais c’est aussi une illusion, qui nous préserve de la brutale réalité : en dehors de ce plateau enchanté, lueur vacillante dans la nuit, à Washington, à Jérusalem, à Moscou, et dans les tunnel