Les autorités ukrainiennes, «une clique de toxicomanes et de néonazis». On s’est tous demandé, en écoutant le discours décousu de Vladimir Poutine le 25 février, d’où sortait cette histoire de gouvernement de drogués, si ce n’est d’un cerveau délirant, progressivement coupé de toute réalité. On avait tort : en qualifiant les Ukrainiens de «Narkoman», Vladimir Poutine était parfaitement cohérent, dans la droite ligne des positions russes en matière de drogue depuis deux décennies, en faisant une référence transparente à l’équation qui les guide : drogue = mal = sida = Occident = Ukraine. De ce point de vue, la guerre à l’Ukraine est aussi une guerre à la drogue, l’atrocité de l’une redoublant la bêtise de l’autre.
Russie et Ukraine font face depuis les années 90 à une situation sanitaire dégradée par deux épidémies imbriquées, l’explosion de la consommation de drogues injectables provoquant, outre une forte mortalité par overdoses, une explosion des cas de VIH-sida, avec des chiffres sans équivalent dans le monde en dehors de l’Afrique (dans les deux pays plus de 1% de la population est porteuse du virus). Mais leur trajectoire diverge nettement depuis une dizaine d’années, l’Ukraine ayant adopté les stratégies de «réduction des risques» validées à l’échelle internationale, avec la mise à disposition de traitements de substitution comme la méthadone, qui permettent d’éviter overdoses et contaminations, alors que la Russie s’entête dans une stratégie de criminalis