Essayer de parler d’autre chose mais ne pas pouvoir penser à autre chose. Etre pris·e d’un besoin enfantin et absurde : celui de sortir de l’histoire. Un instant, se raconter des histoires et les croire.
«N’attendez pas trop de la fin du monde», écrit le poète polonais Stanislaw Jerzy Lec ; cet aphorisme résume parfaitement l’état d’esprit chaotique qui est le nôtre.
N’attendez pas trop de la fin du monde est aussi le titre du nouveau film du réalisateur roumain Radu Jude, dans lequel Angela, une jeune femme au teint blême vêtue d’une robe à paillettes, conduit à toute allure, de l’aube à la tombée de la nuit. Elle arpente une ville-autoroute, shootée au café et autres Red Bull, pour tenir les délais imposés par ses employeurs. Elle accélère, tangue, à la fois survoltée et hébétée, zigzagant d’une file à l’autre pour gagner quelques mètres dérisoires, quelques secondes. Comme elle nous ressemble, Angela.
Nous conduisons à tombeau ouvert sans trop savoir pourquoi, ni vers où on se dirige. Comme Angela, nous sommes abrutis d’images et de discours, comme elle, nous nous efforçons de garder les yeux ouverts, comme elle, nous sommes les personnages d’un récit qui nous échappe.
Le fantasme d’une fin du monde annoncée, ces derniers jours, ressemble presque à une promesse rassurante, à