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La démocratie contre le droit ? Une rhétorique mensongère, par Michaël Foessel

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En principe, la loi protège les régimes démocratiques de possibles dérives. Pourtant, qu’il s’agisse de Trump, d’Orbán ou de Nétanyahou, nombreux sont les dirigeants à l’ériger en adversaire du pluralisme.
Donald Trump lors de la conférence de presse donnée le 31 mai depuis la Trump Tower, à New York. La veille, il avait été reconnu coupable des 34 chefs d’accusation dans l’affaire dite «Stormy Daniels». (David Dee Delgado/Getty Images. AFP)
par Michaël Fœssel, professeur de philosophie à l’Ecole polytechnique
publié le 6 juin 2024 à 12h29

A peine était-il déclaré coupable de falsification de documents par la cour criminelle de Manhattan que Donald Trump a trouvé une réplique imparable : «Je suis un homme très innocent. Le vrai verdict sera rendu par le peuple le 5 novembre.» Trump a beau avoir été condamné par un jury populaire, c’est du peuple, entendez des électeurs, qu’il attend le moyen de laver son honneur. Ce qui est beaucoup plus important encore pour lui, il attend de l’élection présidentielle de novembre le privilège de ne régler aucune des dettes qu’il a contractées avec la justice. Trump mise sur la masse de ses supporteurs inconditionnels qui verront dans sa condamnation une preuve supplémentaire de sa vertu. N’est-il pas naturel qu’une justice corrompue déclare coupable un innocent qui a promis de la combattre ?

C’est là un exemple parmi beaucoup d’autres du renversement opéré par certains démagogues dans le rapport entre droit et démocratie. Là où, en principe, le premier doit protéger la seconde de ses possibles dérives, ils invoquent la seconde comme un recours face aux méfaits du premier. Dans un registre plus dramatique que celui de Trump, Nétanyahou ne dit pas autre chose quand il objecte à