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Billet

La mère et l’enfant, ou pourquoi la justice devrait parfois aider à aimer mieux, par Samira Sedira

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Le tribunal de Rennes a choisi le 5 octobre de retirer son autorité parentale à une femme dont l’adolescent de 14 ans a été découvert dénutri lors d’une visite aux urgences. C’est bien le rôle de la justice de protéger un enfant en danger, mais l’on peut se demander si déchoir de son titre cette mère qui assure n’être coupable d’aucune forme de maltraitance était la meilleure solution.
«Corps nourricier», photographie extraite de la série «les Habitantes», qui interroge notamment le concept d'invisibilisation des femmes dans la société. (Lucie Belarbi/VOZ'Image)
publié le 9 octobre 2023 à 9h55

«Si vous êtes une mère allaitante, faites attention, on va vous retirer votre enfant !» s’est exclamée Stéphanie D. à l’annonce du jugement. Ce jeudi 5 octobre, le tribunal de Rennes vient de la condamner à deux ans de prison avec sursis et de lui retirer son autorité parentale.

Bien qu’étrange, cette déclaration est sans doute la clé pour comprendre le fond de cette affaire.

En juin 2022, Stéphanie D. se présente aux urgences de l’hôpital de Rennes avec son fils de 14 ans victime d’une réaction allergique. Les médecins constatent que l’adolescent est trop maigre et que son suivi médical laisse à désirer. Un signalement est aussitôt fait auprès de la protection de l’enfance. L’adolescent, que sa mère n’a pas déclaré à la naissance, n’est pas scolarisé.

Les journaux s’emparent de l’affaire et l’enfant dénutri devient l’enfant reclus. La mère se défend, assure qu’il n’est pas enfermé, qu’il mange à sa faim, qu’il a accès à tous les lieux culturels et qu’il voit régulièrement d’autres enfants.

«Une espèce de prison affective»

En attendant une décision de justice, l’adolescent est placé à l’aide sociale à l’enfance et ne cesse, depuis, de réclamer sa mère. Un journaliste du Figaro qui a pu le rencontrer le décrit comme un jeune homme au «vocabulaire bien plus riche et varié que celui des autres adolescents de son âge».

A y regarder de près, cette affaire plus complexe qu’elle n’y paraît témoigne de la grande difficulté à concilier les convictions. D’un côté, la mère (inconnue des services sociau