Elle peut se dérouler n’importe où : le contexte n’a pas d’importance. Dans chacun de ces lieux, des objets, des sons, des formes, des gestes hétérogènes et disparates sortent de leur contexte habituel et tissent, pour un temps limité, un dialogue secret. Une exposition est une enceinte improvisée qui sépare un lieu du reste de la réalité, de sorte qu’il s’y produit un miracle, au sens littéral et théologique du terme : un espace-temps dans lequel l’ordre habituel est suspendu.
Pendant un instant, les choses s’assemblent différemment, créant un temps qui ne s’inscrit pas dans la série des causes et des effets. Hors de leur position habituelle, les objets dégagent une vérité qui ne leur appartient pas lorsqu’ils sont à leur place. Mais dans cet état, ils ne se contentent pas d’émettre une voix imperceptible dans d’autres contextes : le miracle est ailleurs. En effet, chaque objet fusionne son discours avec celui des autres, de sorte qu’émerge une voix radicalement différente, chorale, océanique, qui n’appartient plus spécifiquement à aucune des pièces exposées. Côte à côte, ils donnent vie à un monde alternatif qui semble briller précisément par sa nature éphémère.
Le bourgeon d’un monde à venir
Cependant, contrairement aux miracles des mythologies anciennes, la fin du miracle ne coïncide pas ici avec un retour à l’état antérieur. Lorsque la grâce du prodige s’éteint et que le temps reprend ses droits, tout semble contaminé par ce qui s’est passé : de même qu’un aimant oriente la limaille de fer à distance,