Il se lève posément de son strapontin comme pour un discours, lisse son pantalon du plat de la main et, aux voyageurs tout autour, déclare : Ça / n’est / pas / possible / ça / n’est / pas / possible. Il tonne, ouvrant largement les bras, comme s’il nous invitait à conspuer l’impuissance d’un dieu quelconque, pas / possible / ça ! La phrase tourne en boucle, mêlée aux grincements du métro, une scansion de fer. Ses imprécations créent le vide autour de lui. On l’évite. On le fuit, je le fuis, je traverse tout le wagon de métro dans l’espoir de ne plus l’entendre, ses mots sont les miens, les nôtres : bien sûr qu’on le sait, que ça n’est pas possible, ça. Chacun d’entre nous porte son «ça», mais on le tait, on l’enfouit, surtout au moment des célébrations de fin d’année où on se doit d’afficher allégresse et sérénité, quelle tâche impossible. Les «fêtes» nous vrillent le cœur, elles écorchent, épuisent, qu’on s’y jette avec l’espoir de les «réussir», de retrouver une féerie fantasmée datant de notre enfance, ou qu’on les contourne.
Janvier ferme la porte au nez du faste clinquant de décembre
Ce que les «fêtes» célèbrent est une addition de normes, une impitoyable suite de cases à cocher, affectives comme économiques : famille heureuse, enfants photogéniques, appartement décoré, cadeaux de goût, mets d’exception. L’injonction à être réunis et heureux de l’être nous laisse un peu sonnés aux premiers jours de l’année nouvelle. Janvier est un mot dérivé de Janus, nom du dieu des portes, des transitions, des passages et des commencements dans