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Chronique «Historiques»

L’illusion postfasciste, par Michaël Fœssel

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Après la victoire de Fratelli d’Italia, la formule s’est imposée pour qualifier le parti de Giorgia Meloni. Le «post» suggère que nous vivons désormais, et pour toujours, après le fascisme. Ce qui n’est pas le cas.
par Michaël Fœssel, Professeur de philosophie à l’Ecole polytechnique
publié le 5 octobre 2022 à 21h50

Dans les périodes de confusion idéologique, la caractérisation des mouvements politiques devient elle-même un enjeu politique. Après le triomphe de Fratelli d’Italia, c’est la formule «postfascisme» qui s’est imposée à la plupart des commentateurs. Loin d’être un problème réservé aux spécialistes de taxinomie politique, le choix de cette formule dit quelque chose de notre désir de nommer le présent sans apparaître prisonniers du vocabulaire du passé. Mais, pour le coup, la croyance bien ancrée selon laquelle l’histoire ne repasse pas les plats entre en contradiction avec le constat qu’il existe des échos troublants entre aujourd’hui et hier.

La biographie et le discours de Giorgia Meloni ne permettent pas de s’en sortir en prétendant, comme on le faisait pour Matteo Salvini, qu’il n’y a fascisme que s’il y a des chemises noires et des appels tonitruants à marcher sur Rome pour mettre à bas la démocratie. Ancienne membre du MSI (un parti qui se revendiquait explicitement de l’héritage du Duce), la future présidente du Conseil italien déclarait, il n’y a pas si longtemps, que Mussolini avait été le plus grand homme d’Etat de l’Italie contemporaine. Certes, elle ne le dit plus. Mais tout ce qu’elle dit par ailleurs (sur les étrangers, les d