Personne ne comprend rien à cette inquiétante histoire de piqûres en discothèque. Mais les historiens peuvent toujours dire, comme à chaque fois qu’ils ne comprennent rien : «C’est pas nouveau, cette affaire». Vers l’an 200, l’historien Dion Cassius rapportait dans son Histoire romaine que sous le règne de l’empereur Domitien, «des personnes se mirent à enduire des aiguilles avec du poison, et à s’en servir pour piquer qui ils voulaient» ; il y eut des morts, précise Cassius, et «ces choses arrivèrent à Rome mais aussi dans le monde entier». Les histoires de piqûres empoisonnées, où les agresseurs et leurs mobiles restent flous et où les victimes sont souvent des jeunes filles abusées par la suite, sont présentes dans de nombreuses cultures ; les spécialistes y voient même un archétype narratif, avec ses variantes en épine de rose, épingle à cheveux, seringue hypodermique, et bien sûr fuseau pointu (la Belle au bois dormant).
A partir du XIXe siècle, l’engouement de la presse pour les faits divers brouille les frontières de la légende et du réel, en se faisant l’écho d’affaires liées aux piqûres, comme les attaques en série de femmes à Paris en 1819, dénichée récemment par le journaliste du Parisien Charles de Saint-Sauveur, ou comme à