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Libération
La chronique de Johann Chapoutot

Planète, t’es foutue, les moteurs sont dans la rue

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Malgré les beaux discours sur «l’écoconduite» et les véhicules électriques, décroissance et frugalité ne sont pas des priorités en matière d’automobiles. Plus nombreuses et plus grandes, les voitures dictent toujours leur loi, en totale contradiction avec l’enjeu climatique.
«Cette inflation est sans limite, car les pouvoirs publics ne la régulent pas. Pas plus qu’ils n’imposent le covoiturage.» Ici, sur l'A7, le 15 août 2022. (Nicolas Guyonnet /Hans Lucas. AFP)
publié le 2 février 2023 à 6h36

Les parents qui, avec leurs enfants, fréquentent les jardins publics et leurs «aires de jeu» (cette manie de tout labelliser…) l’auront sans doute remarqué : les installations, du toboggan à la cabane, du pont suspendu au vaisseau pirate, sont souvent de facture germanique. C’est en effet en Allemagne que cet art de la distraction enfantine s’est développé. Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, deux chiffres sont en hausse dans ce pays : celui de la natalité et celui de la circulation automobile. Le développement industriel allemand mise en effet tout sur la voiture : cela fait travailler l’acier, la chimie, l’électricité, le plastique – bref, les fondamentaux. Et la voiture individuelle charrie un idéal d’émancipation, de liberté individuelle – comme si elle n’était pas surtout cause de tracas, de frais et d’accidents – qui s’accorde bien avec les désirs et les aspirations d’une société en voie de rajeunissement. Plus d’enfants et plus de voitures dans les rues : le taux d’accidents monte dramatiquement et l’idée s’impose partout de fonctionnaliser les espaces – la rue aux moteurs, et des lieux réservés pour les enfants. La voiture dicte sa loi à l’espace urbain, et s’insinue jusque dans les jeux, comme en témoignent les pneus usagés que l’on confie aux enfants, ou les sols caoutchouteux de leurs aires.

La royaut