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Chronique

Procès des viols de Mazan : en faire un boucan d’enfer, par Lola Lafon

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Procès des viols de Mazandossier
En refusant le huis-clos, Gisèle P., victime pendant dix ans de son époux et de dizaines d’hommes recrutés par ce dernier, exige de nous que nous regardions, que nous lisions, que nous écoutions. Cette affaire n’a rien d’un fait divers «hors norme», elle est le miroir grossissant de tout viol conjugal.
Gisèle P. s'adresse aux médias à la sortie du tribunal d'Avignon, le 5 septembre. (Lewis Joly/AP)
par Lola Lafon, écrivaine
publié le 5 septembre 2024 à 16h33

On aura été témoins de tant de gestes exceptionnels, cet été olympique ; on aura fêté et célébré le courage, la force, la capacité à dépasser ses limites. Qu’est-ce qu’un exploit ? C’est une «action d’éclat, héroïque», c’est une prouesse, selon les définitions. Comme on aime y assister, les regarder. Aujourd’hui, une femme s’apprête à accomplir un exploit. Sa force est inimaginable. Son courage est sans pareil. Elle n’est porteuse d’aucun drapeau à moins qu’elle ne les porte tous. Aucune médaille ne viendra la récompenser : tout juste espère-t-on qu’elle sera entendue. C’est elle qui nous regarde. Elle nous invite à nous pencher sur l’abîme dans lequel elle n’a pas sombré ; qu’on y plonge, avec elle. Cette femme se prénomme Gisèle. Si je n’écris pas son nom de famille, c’est qu’il n’est pas le sien, il appartient à celui qui fut son mari, devenu un bourreau.

Gisèle détient un savoir terrible et monumental ; elle porte la fin d’une illusion à laquelle on continue à s’accrocher. Elle vient confirmer la fin d’un mythe qui a tous les atours d’un déni collectif : le mythe du monstre. Ce monstre si