On la connaît bien, cette histoire : elles arpentaient les allées d’un supermarché, elles sortaient du lycée, d’un café ou de leur cours de danse et là, un casting directeur les a abordées, c’est ainsi qu’elles ont été repérées. On la connaît tellement, cette histoire : celle de jeunes anonymes qu’un regard d’adulte révèle au monde, des enfants métamorphosées en actrices. L’histoire du cinéma en est remplie, de ces narrations dont on se repaît : elles n’étaient qu’elles-mêmes. Mais le cinéma rôdait, qui les a flairées et «découvertes», pour mieux nous les offrir, se les offrir.
Ce conte, un avant-après fantasmatique qui escamote la notion de travail, du métier d’actrice, dit, en substance, qu’une actrice est créée par le désir d’un réalisateur, que ce dernier la fabrique. Et ce conte a été au cœur des rêveries de mon adolescence, comme peut-être de la vôtre. Pas une semaine ne passait sans qu’on lise dans un magazine le récit de «la» rencontre décisive : Béatrice Dalle découverte dans la rue, Natalie Portman dans une pizzeria, Sophie Marceau, dans une audition qu’elle passait «par hasard», comme, des décennies plus tôt, Lana Turner «trouvée» dans un drugstore. Comme on en rêvait, de ce regard d’adulte qui se poserait sur nous, comme on l’attendait, cette validation ; mais quand serait-on enfin élues, sorties de nos vies au bois dormant ?
Repérage, repérée, repérer : verbe transitif : «Apercevoir, distinguer, remarquer parmi d’autres quelqu’un ou quelque