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Chronique «Philosophiques»

Vieillir, la fin du calcul

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La logique qui veut que les individus demeurent rentables «tout au long de leur vie» trouve sa limite à la fin de leur existence, lorsque leur force de travail est épuisée et qu’ils ont le mauvais goût de s’obstiner à vivre.
Michaël FOESSEL.
par Michaël Fœssel, Professeur de philosophie à l’Ecole polytechnique
publié le 10 février 2022 à 22h56

Le scandale lié à la maltraitance subie par des patients des Ehpad et le délabrement de quantité d’institutions suscite de nombreuses réflexions. Les premières sont liées à la surprise de découvrir que l’entreprise incriminée (Orpea) est cotée en Bourse, ce qui, c’est le moins que l’on puisse en dire, n’a rien d’évident. Entre le soin du grand âge, par définition improductif, et la loi de la maximisation du profit, il y a une contradiction qui ne peut se dénouer qu’au détriment des personnes âgées. Comment rendre économiquement rentables des corps qui ne travaillent plus, ne produisent pas et consomment à peine ? La réponse à cette question est aussi simple que glaçante : il faut réduire au maximum les coûts liés à l’entretien de ces corps tout en maintenant des honoraires élevés.

La logique qui veut que les individus demeurent rentables «tout au long de leur vie» trouve tout naturellement sa limite à la fin de leur existence, lorsque leur force de travail est épuisée et qu’ils ont le mauvais goût de s’obstiner à vivre. Comme on l’a constaté au début de la pandémie, les «vieux»