Nous, chercheurs en sciences humaines et sociales, même si nous ne sommes pas exclusivement issus de ces domaines, sommes profondément préoccupés par l’isolement croissant de nos collègues universitaires en Israël. Les appels au boycott des institutions universitaires israéliennes ne sont pas nouveaux, mais depuis l’attaque brutale du Hamas le 7 octobre 2023 et la guerre qui a suivi entre le Hamas et Israël, ces appels ont pris une nouvelle dimension. Le 12 avril 2024, le quotidien israélien Haaretz a publié un article basé sur des entretiens avec plus de 60 universitaires israéliens faisant état d’un éventail étonnant de pratiques discriminatoires. Il s’agit notamment de la fin des collaborations scientifiques, de l’annulation des invitations à des conférences, du refus de prendre en compte les soumissions scientifiques aux revues, du rejet des évaluations de promotion et du retrait des offres de nominations universitaires, entre autres cas.
Débats
Quelle que soit la façon dont chacun d’entre nous analyse actuellement la situation sur le terrain et évalue les actions du gouvernement et de l’armée israélienne, nous voulons indiquer clairement que nous nous opposons à toutes les formes de boycott visant les universitaires israéliens et les institutions universitaires israéliennes. Nous plaidons fermement pour la coopération et la poursuite du travail avec eux. Nous sommes également convaincus que l’exclusion progressive, souvent subtile, des universitaires israéliens contredit les principes fondamentaux de comportement professionnel et de liberté académique. De plus, un boycott universitaire contre Israël est contre-productif en ce qui concerne les débats internes israéliens ainsi que le dialogue israélo-palestinien, comme l’a soutenu Barak Medina dans son essai Est-il justifié de boycotter les universités israéliennes ?
Récit
Nous croyons fermement que les échanges internationaux – en particulier dans des temps troublés comme ceux-ci – sont essentiels au maintien d’une communauté universitaire ouverte et mondiale. La tendance alarmante consistant à exclure les universitaires israéliens du discours universitaire international nécessite une réponse sans équivoque de notre part. Nous, appelons les universitaires à faire preuve de solidarité avec nos collègues israéliens sur cette question cruciale.
Tribune à l’initiative de : Anne Rethmann, Université de Berlin (Allemagne), Université de Jérusalem (Israël) ; Daniel Siemens, Université de Newcastle (Angleterre) ; Helmut Walser Smith, Université de Vanderbilt (Etats-Unis).
Premiers signataires : Seyla Benhabib, Université de Yale (Etats-Unis) ; Michael Walzer, Université de Princeton (Etats-Unis) ; Christopher Browning, Université de Caroline du Nord (Etats-Unis) ; Steven Pinker, Université de Harvard (Etats-Unis) ; Luc Boltanski, Ecole des hautes études en sciences sociales, EHESS (France) ; Robert Putnam, Université de Harvard (Etats-Unis) ; Eva Illouz, EHESS (France) ; Armin Nassehi, Université Louis-et-Maximilien de Munich (Allemagne) ; Michael Brenner, Université Louis-et-Maximilien de Munich (Allemagne) ; Christoph Möllers, Université de Humboldt à Berlin (Allemagne) ; Rahel Jaeggi, Université de Humboldt à Berlin (Allemagne) ; John Keith Hart, Université de Cambridge (Angleterre) ; Simon M. Schama, Université de Columbia (Etats-Unis) ; Michel Gherman, Université fédérale de Rio de Janeiro (Brésil) ; Philipp Ther, Université de Vienne (Autriche) ; Annette Becker, Université Paris-Nanterre (France) ; Pierre Birnbaum, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (France) ; Carlo Ginzburg, Université de Los Angeles (Etats-Unis) ; Jakob Tanner, Université de Zurich (Suisse)…