Mise à jour à l’occasion de la mort de Robert Badinter, le vendredi 9 février.
«Le Sénat me pardonnera si je dois m’exprimer avec une voix voilée. Ce n’est point l’émotion, ce n’est pas encore la conséquence de la fatigue ; c’est simplement le malencontreux hasard d’une rencontre avec une nappe de brouillard.» Le 28 septembre 1981, le garde des Sceaux, Robert Badinter, entame son discours à la tribune du Sénat. Quand il conclut, quelques instants plus tard, il sait qu’il faut convaincre : «Si vous considérez, en conscience, qu’aucun homme n’est totalement coupable, qu’il ne faut pas désespérer de lui pour toujours, que notre justice, comme toute justice humaine, est nécessairement faillible et que tout le progrès de cette justice a été de dépasser la vengeance privée et la loi du talion, alors vous voterez pour l’abolition de la peine de mort.» Les sénateurs n’ont que deux jours pour adopter le texte dans les mêmes termes que l’Assemblée nationale. In extremis, le 30 septembre 1981, l’abolition est définitivement votée.
Quarante ans plus tard, Robert Badinter reçoit Libération dans son appartement proche du jardin du Luxembourg, à Paris.