La page est jaunie et trouée d’une brûlure de cigarette. Signe de l’appréhension de l’oratrice peu avant son discours à l’Assemblée, le 26 novembre 1974, ou simple étourderie d’une ministre de la Santé qui fumait beaucoup ? Du 8 mars au 2 septembre 2024, les Archives nationales exposent à Paris quelques pages du célèbre discours de Simone Veil défendant son projet de réforme de la législation sur l’avortement.
Sur le document dactylographié, de fines lignes rouges marquent les pauses – «un arrêt», «grand arrêt (verre d’eau)» – et soulignent les passages sur lesquels insister : «La situation actuelle est mauvaise. Je dirai qu’elle est déplorable et même dramatique» ; «C’est à ce désordre qu’il faut mettre fin. C’est cette injustice qu’il convient de faire cesser.»
L’IVG ne viendra pas entraver la natalité
A côté des pages lues au pupitre de l’Assemblée se trouve un brouillon manuscrit, dans la même encre rouge, qu’elle aurait écrit à côté du berceau de sa petite-fille. «C’est une écriture rapide, commente l’archiviste Charlène Fanchon, commissaire scientifique de l’exposition avec l’historienne Bibia Pavard. On voit qu’elle jette ses idées, on a l’impression que la pensée se bouscule.» Ce premier jet, que Veil pensait avoir perdu, montre comment chaque mot a ensuite été pesé. «Je voudrais tout d’abord faire une observation», écrit tout d’abord l’oratrice. Puis elle raye «observation», corrige en «réflexion». La phrase manque de poids, avant que la formule surgiss