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Libération
L'édito de Dov Alfon

Tous métis, et alors ?

Selon les statistiques de l’Insee, des millions de Français sont issus du métissage. Malgré les discours racistes, cette richesse culturelle, une chance, s’ancre dans la société.
Quand la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a tenter de rouvrir le débat sur les statistiques ethniques en juin 2020, Macron a vite fait savoir qu’il ne le souhaitait pas. (Westend61/Getty Images)
publié le 5 avril 2024 à 21h20

Dans l’imaginaire collectif, ils sont plus cool que les autres, plus fantasmés aussi, comme le prouve bien leur omniprésence dans les spots publicitaires, les présentations de start-up, les défilés de mode et les séries TV. Ils (et elles) sont enfants de couples mixtes, encore appelés «métis», bien que «multiculturels» seraient plus dans l’air du temps. Nous avons voulu savoir ce qu’ils pensaient de l’image qui leur est ainsi renvoyée. Comment ressentent-ils ce nouveau désir de les ériger en modèle social ? «Mon frère et moi, nous étions les seuls noirs de l’école et on était fiers de l’être», nous raconte l’un d’eux, et l’une se souvient encore de l’ex qui l’appelait tendrement «mon petit oiseau des îles».

L’écrivaine Zadie Smith explique dans un de ses textes autobiographiques que «si vous avez une couleur de peau qui les intrigue, tôt ou tard tout homme que vous rencontrez vous offrira une reproduction de Paul Gauguin». La sociologue Solène Brun, qui a récemment publié une enquête fouillée sur les enfants de couples mixtes en France, rappelle que l’amour n’est pas forcément égalitaire, et qu’il existe bien des nuances dans ce métissage maintenant élevé à hauteur de mythe.

Combien sont-ils, déjà ? Personne ne le sait exactement, et personne ne cherche trop à le savoir. Quand la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a timidement tenter de rouvrir le débat sur les statistiques ethniques en juin 2020, Emmanuel Macron a vite fait savoir à l’AFP qu’il ne le souhaitait pas «à ce stade». On peut savoir en recoupant les différentes données de l’Insee que la France compte 4 millions de personnes ayant un parent immigré et un français, dont 1,7 million dont le parent immigré est né en Afrique. Cela fait beaucoup de Français très cool, oui, mais ce chiffre reflète surtout une richesse culturelle encore bien loin d’être définie et explorée.