Menu
Libération
France Algérie : réparer les liens (2/6)

A Nancy, la statue du sergent Blandan, vestige colonial indéboulonnable même pour mon père

Article réservé aux abonnés
La crise entre la France et l'Algériedossier
Lorsque son père, réalisateur algérien en exil, découvre à Nancy une statue du colonisateur glorifié par la propagande, une question se pose à Dorothée-Myriam Kellou : que faire de ces symboles qui vantent un passé violent ?
Statue du sergent Blandan à Nancy. (Patrick Escudero/Hemis. AFP)
par Dorothée-Myriam Kellou, journaliste, auteure et réalisatrice
publié le 24 avril 2025 à 16h15

Entre la France et l’Algérie, les tensions diplomatiques persistent. Alors que l’écrivain binational Boualem Sansal est toujours emprisonné, en France la droite et l’extrême droite instrumentalisent la mémoire coloniale. Ces polémiques médiatiques et ce bras de fer entre gouvernements ne sauraient éclipser la densité des liens intimes tissés entre les deux sociétés. De la nécessité de reconnaître les crimes de la colonisation à la valorisation d’une culture commune, Libération a voulu donner la parole à des spécialistes de cette relation aussi riche que douloureuse.

 A la fin des années 1980, mon père, Malek, réalisateur algérien exilé en France, s’installe à Nancy. Un matin neigeux, il se retrouve nez à nez avec la statue du sergent Blandan. Il est stupéfié. Cette statue, il l’avait déjà croisée, enfant, à Boufarik, en Algérie. «Qui est ce soldat ?» avait-il demandé, terrifié, tandis que sa mère lui ordonnait de «manger son orange et de se taire». En pleine guerre d’Algérie, elle avait compris que le silence protège.

Des années plus tard, cette statue a fait ressurgir le refoulé colonial. Elle venait l’étrangler dans ses cauchemars. Au réveil, il écriv