Nous dormons de moins en moins, et de plus en plus mal. En cinquante ans, nous avons perdu plus d’une heure trente de sommeil quotidien. Cette lente érosion, pourtant silencieuse, est lourde de conséquences : troubles de l’humeur, états dépressifs, baisse de concentration, inégalités sanitaires croissantes en sont les principaux symptômes. Et pourtant, aucun grand discours politique, aucun texte législatif ou réglementaire, ne se saisit pleinement de ce sujet.
Tout au plus est-il évoqué au détour de réglementations sur le bruit nocturne, ou via la question du repos dans le droit du travail. Mais sa place dans l’existence humaine est traitée comme secondaire, voire accessoire. Cette indifférence est révélatrice : dans l’ordre marchand, dormir est une activité sans valeur et sans rendement. Comme le note Jonathan Crary dans 2