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TRIBUNE

Avec «Tirailleurs», jamais les soldats africains n’auront ainsi été mis en avant

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Le film porté par Omar Sy, qui met en lumière ces combattants envoyés en France en 1914-1918, n’est pas précurseur mais signe l’aboutissement d’un long travail de mémoire polyphonique, analyse l’historien Anthony Guyon.
Ici «Tirailleurs» de Mathieu Vadepied. Certains des soldats restent dans des camps du sud de la France entre 1919 et 1921 avant leur rapatriement. (Marie-Clémence David/Gaumont)
par Anthony Guyon, historien et enseignant
publié le 9 janvier 2023 à 17h33

La sortie du film Tirailleurs a été l’occasion de débats sur la juste reconnaissance, puis la place des tirailleurs sénégalais dans les mémoires et l’histoire. Au cours de la Première Guerre mondiale, 200 000 d’entre eux, venus de l’ensemble de l’Afrique occidentale française et équatoriale française, ont combattu sur plusieurs fronts en Afrique, aux Dardanelles et en France. 20 % de cet effectif sont morts au combat, mais aussi de maladies telles les infections pulmonaires ou la grippe espagnole, qui sévit en France et en Afrique à la fin du conflit. S’ils traversent l’ensemble de la guerre, d’août 1914 à novembre 1918, leurs retours se révèlent tardifs et lents. Certains demeurent ainsi de 1919 à 1921 dans les camps du sud de la France en attendant leur rapatriement et leur démobilisation sur le continent africain.

D’emblée, leur rôle a été reconnu à l’échelle locale, dans les endroits où ils ont combattu (Douaumont en 1916, Reims en 1918) ou vécu (Fréjus, Menton, en Gironde). Et ce d’autant plus qu’après la guerre, les tirailleurs sénégalais, désormais recrutés essentiellement par des arrangements avec les sociétés locales ou par tirage au sort, s