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Libération
TRIBUNE

Berlusconi jusqu’à la nausée

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L’écrivaine italienne Giulia Caminito raconte l’emprise et l’omniprésence de l’homme sur la population. Seule la mort de Silvio pouvait mettre fin à la saison Berlusconi.
Un portrait en hommage à feu l'ex-Premier ministre italien Berlusconi est affiché au Palazzo della Regione Liguria, à Gênes, le 12 juin 2023. (Anna Kurth/AFP)
par Giulia Caminito, Ecrivaine
publié le 19 juin 2023 à 16h38

Quand j’avais 8 ou 9 ans, mon père se disputait souvent avec mon grand-père pendant les déjeuners du dimanche : mon grand-père a voté pour Berlusconi jusqu’à sa mort, et mon père, qui n’avait pas les mêmes opinions politiques, essayait de le convaincre d’arrêter. Mon grand-père est né en Afrique coloniale italienne, il a grandi seul avec un père absent, dans les rues d’Asmara, puis d’Assab et, enfin, d’Addis-Abeba. Il a occupé différents emplois, docker au port de Massaoua, gérant des pompes à essence Shell, ouvrier sur des chantiers d’autoroute ou encore interprète pour des organismes anglais. Il voyait en Berlusconi un modèle de vie : entrepreneur à succès, chanceux avec les femmes, qui parlait aux aspirations moyennes des hommes italiens.

Pour mon grand-père, Berlusconi représentait les objectifs de vie que lui-même n’avait jamais atteints, il le trouvait sympathique, impertinent. Il avait un franc-parler, des idées très simples et des slogans prônant la confiance dans le pays, la prospérité économique et la libération de l’énorme charge fiscale qui écrasait la classe moyenne.

A une période de ma vie, sans doute la plus alerte de mon adolescence, je me suis sentie cernée par Silvio Berlusconi : il était un sujet de conversation à la maison, il était tout le temps à la télé, ses émissions légères