Au printemps de 1944, le Premier ministre Churchill est mortellement inquiet des possibilités d’échec du plan Overlord. C’est qu’il est bien placé pour connaître les faiblesses de ce genre d’entreprises : depuis les Dardanelles au printemps de 1915 jusqu’à Anzio en janvier 1944 en passant par Narvik, Dakar, Dieppe, Casablanca et la Sicile, tous les débarquements ont provoqué des pertes disproportionnées et révélé de sérieux dysfonctionnements dans la planification, le renseignement, la logistique et le commandement alliés – pour des opérations sur des théâtres périphériques et contre des côtes peu ou pas fortifiées. Or, il s’agit désormais de s’attaquer au mur de l’Atlantique et au centre névralgique du dispositif allemand, sans bénéficier de ports, de supériorité numérique et d’effet de surprise…
C’est donc en pensant aux périls de cet assaut frontal que Churchill a imaginé de nombreux plans d’opérations périphériques, comme un débarquement à Bordeaux, au Portugal ou en Yougoslavie. Mais à ce stade, la décision ne lui appartient plus : les décideurs, ce sont à présent les membres du comité des chefs d’état-major combinés, trois Britanniques – Brooke, Portal et Cunningham – et trois Américains – Marshall, King et Arnold. En théorie, ces grands professionnels ne font que proposer les initiatives stratégiques à Roosevelt et à Churchill, mais en pratique, ce sont eux qui orientent la stratégie alliée depuis l’été de 1942 – lorsqu’ils parviennent à s’entendre…
Chaîne de commandement bien ordonnée
Ces six hommes-là on