L’outrance des critiques adressées à la justice à la suite de la condamnation de Marine Le Pen dans l’affaire des assistants parlementaires du RN a conduit les plus hautes autorités judiciaires et administratives du pays à prendre la parole dans les médias pour inciter au respect de l’Etat de droit, pilier de notre modèle de démocratie libérale. Il n’est pas sûr que brandie comme un slogan, la notion d’Etat de droit élaborée par les juristes allemands au XIXe siècle, et dont le succès tient en grande partie au caractère indéfini et ambigu de son contenu, suffise à apaiser la colère contre l’institution judiciaire. Colère ravivée par une décision dont on ne peut nier qu’elle peut être lourde de conséquences sur l’expression à venir du suffrage populaire.
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Dans un pays qui se caractérise par une longue tradition de méfiance envers le juge, largement entretenue par les élites politico-administratives, il ne semble pas plus judicieux de vouloir asseoir l’autorité des juges sur une part de souveraineté. La vision d’un partage de souveraineté entre le peuple et les juges, apparue sous l’Ancien Régime et réactivée au début du XXe siècle, a été reprise par Pierre Rosanvallon dans son dernier entretien au journal le Monde. Mais elle heurte le sentiment de beaucoup de Français, certainement rétifs à admettre que «les juges incarnent autant que les élus le principe démocratique de la souveraineté du peuple». La distinction entre un «peuple arithmétique» constitué par le vot